Décryptage : Géosciences pour une terre durable

« L’évolution du trait de côte : une opportunité pour interroger nos pratiques et adapter nos politiques territoriales … »
Ywenn DE LA TORRE Directeur du BRGM* a répondu aux questions posées par la DEAL/Coopération Internationale

Qu’est ce que le « trait de côte ?

La définition de ce terme est complexe. Elle recouvre à la fois les notions de littoral et de limite jusqu’à laquelle peuvent parvenir les eaux marines. Quadridimensionnel puisqu’il peut varier dans les trois dimensions de l’espace mais aussi dans le temps, le trait de côte est soumis à de nombreuses pressions.
Son intérêt intrinsèque réside tant dans l’étude de son évolution naturelle qu’au regard des risques naturels (érosion, submersion) accrus par les changements climatiques.
En Guadeloupe, plus encore que dans d’autres régions, l’impact sur ces zones sensibles est d’autant plus prégnant que ce territoire, qui avait historiquement fait l’objet d’une installation massive dès le milieu du XIXème siècle par des populations « sans terre » , occupant les « 50 pas du Roy »*, devenus « 50 pas géométriques », a vu s’accroître la fréquentation liée aux activités économiques et de loisirs.

Quelle évolution et quelles stratégies pour les territoires littoraux de Guadeloupe ?

C’est dans le but d’apporter des éléments de réponse à cette question qu’à l’initiative du BRGM, en partenariat avec la DEAL, avec qui a été monté un Observatoire du littoral guadeloupéen (cantonné à dix sites), qu’une soixantaine de parti­cipants se sont réunis.
Experts et administratifs de Collectivités, agents de l’État locaux et nationaux (Conservatoire du Littoral, ONF, ADEME, « Agence des 50 pas géométriques »…), élus et uni­versitaires ont confronté leur expérience, observé les pratiques et exposé leurs solutions lors de journées d’études qui se sont déroulées les 9,10 et 11 mai 2017.
Quatre des dix sites du littoral guadeloupéen s’inscrivant chacun dans des problématiques distinctes ont été visités. Il s’agit des plages de La Perle à Deshaies, des sites de Bovis et Bel Air à Petit-Bourg, et des plages du Bourg de Sainte-Anne et de la Pointe de la Verdure au Gosier.
Emblématiques du fait de leurs problématiques très différentes, les sites des Villes de Petit-Bourg et de Sainte-Anne ont particulièrement retenu notre attention.
Les premiers du fait de l’exposition des populations résidant dans ces zones aux risques précités, le deuxième, en raison des solutions innovantes envisagées pour la préserver malgré la forte et constante fréquentation.

Quelle perspective caribéenne ?

Les incertitudes et les conséquences considérables sur nos pays insulaires des bouleversements climatiques obligent tant à se poser de nouvelles questions qu’à développer de nouvelles pratiques, notamment en termes de gouvernance. Aussi, le BRGM, fort de cette expérience, a souhaité étendre son expérience au niveau caribéen.
C’est dans ces conditions qu’il a établi le projet CARIBCOAST, véritable réseau de prévention des risques côtiers dans la Caraïbe, constitué de trois axes : la connaissance, les modalités de suivi et de gestion de l’érosion côtière et la création d’un outil d’aide à la décision et à la gestion du risque en appui aux politiques publiques locales.
Outre la Martinique et Saint-Martin, la Jamaïque, Porto-Rico et Trinidad et Tobago sont les partenaires initiaux à ce projet qui a été soumis au jury du programme INTERREG le 31 Mai 2017.
Cette initiative, si elle était retenue, constituerait une véritable opportunité pour que l’évolution du trait de côte ne soit pas subie comme une fatalité mais perçue, au contraire, comme une opportunité pour interroger nos pratiques et adapter nos politiques territoriales pour le mieux être et la sécurité de nos populations.

Voir aussi l’article "Quelle stratégie pour la gestion du littoral" ?

BRGM* : Bureau de Recherches Géologiques et Minières
*50 Pas du Roy, d’une largeur de 81,20 m dans le système métrique.

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Propos recueillis par par Clémence Nadeau.

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