[REPORTAGE] Des hackers pour rendre la Guadeloupe « tsunami-ready »

CaribeWave ?

Organisé par l’Unesco, l’exercice CaribeWave réunit tous les ans 48 États de la Caraïbe autour de la simulation d’un tsunami, afin de tester les systèmes d’alerte et de gestion de crise. L’occasion idéale de sensibiliser la population à ce risque. Le scénario catastrophe 2018 : un séisme de magnitude 8.6 au large de la Barbade générant des vagues de 3 m de haut en Guadeloupe. De quoi détruire beaucoup de bâtiments et inonder le littoral.

Cette année, la préfecture a activé son Centre opérationnel de défense (COD) dans le cadre du dispositif d’organisation de la réponse de sécurité civile. La DEAL était présente en COD, mais également aux côtés de l’association HAND, Hackers Against Natural Disasters.

Des hackers en Guadeloupe

Vous avez dit hackers ? Loin de l’image du gangster de l’informatique agissant depuis sa sinistre cave, le hacker, pour HAND, est en fait celui qui détient un savoir et cherche à le développer, en concevant des solutions innovantes pour parvenir à ses fins, quel que soit son domaine de compétences.

L’association HAND, fondée et présidée par Gaël Musquet (son portrait ici), milite pour une technologie libre, collaborative (« open-source ») aux mains des citoyens, pour prévenir et gérer les crises. Jouissant de leur indépendance d’esprit, les hackers de HAND, qu’ils soient spécialistes des médias sociaux, dronistes, cartographes ou encore codeurs, ont mis les bouchées doubles pour finaliser leurs outils.

D’autres équipes à La Désirade, Morne-À-L’eau (avec le FabLab de Jarry [association de technophiles basée en Guadeloupe, en partenariat avec HAND, ndlr]) et à Saint-Martin ont également fait des tournées dans les établissements scolaires pour sensibiliser les jeunes aux risques naturels. À Saint-Martin, avec l’aide de l’association Tilt !, un grand hôtel de tourisme a été évacué et des formations de gestion de crise ont été dispensées (voir l’interview du gérant de l’hôtel ici).

Côté DEAL, nous avons passé la journée de l’exercice à Marie-Galante, au camp de base, où nous avons observé 21 hacktivistes de HAND gérer la crise (les portraits de l’équipe, ici). Madame le Maire de Capesterre-de-Marie-Galante, pompiers, gendarmes et Routes de Guadeloupe étaient aussi au rendez-vous pour observer le dispositif.

Le 15 mars - une journée à toute allure

Journée de mise en pratique des outils développés par l’équipe. Community-managers, cartographes, codeurs, dronistes, radioamateurs – tous étaient en effervescence sur un camp de base bien équipé : autonomie partielle en électricité (indépendance énergétique de secours créée grâce à deux panneaux solaires, une batterie de voiture et un alternateur), multiples antennes radio dressées, étalage d’ordinateurs se faisant face, radios et talkies-walkies sur les tables, drone prêt à s’envoler.

Il est 10h01 : HAND reçoit le message d’alerte donné par le Pacific Tsunami Warning Center. La vague est prévue pour arriver 69 minutes plus tard. Instantanément, le premier tweet d’alerte est envoyé par HAND. Des tweets réguliers progresseront avec l’avancée de la vague. L’ambition est de diffuser au plus vite et le plus largement le message. Autre moyen redoutablement efficace à cet effet : le cell-broadcast, qui permet à chaque téléphone, dans un périmètre défini, de recevoir un sms d’alerte, prioritaire sur le réseau. Adopté par plusieurs pays pour prévenir les populations en cas de catastrophe, le cell-broadcast n’est pas encore utilisé par la France, où la technologie a pourtant été élaborée en 1997. Une autre idée ? Le Common Alerting Protocol, qui permet de déclencher un message d’alerte standardisé à travers tous les canaux messenger (Facebook, WhatsApp, etc.). Il est aussi possible de faire basculer automatiquement les postes de radio sur un canal d’alerte et d’inscrire des messages : « Alerte Tsunami, rejoignez les hauteurs à pied » par exemple. Les options ne manquent donc pas pour diffuser l’alerte. Reste alors à évacuer. Le projet EXPLOIT de l’Université de Montpellier a cartographié les zones soumises au risque tsunami, mais aussi des sites refuges et les itinéraires les plus courts pour y parvenir.

Le phénomène passé, vient la gestion de crise. L’équipe de radioamateurs peut émettre sur plusieurs ondes, maximisant ainsi les chances de communiquer en cas de crise : wifi, 4G, satellite, VHF… « Aujourd’hui on n’a aucune excuse pour être isolé, le problème n’est pas technique » nous explique Gaël Musquet. Une antenne permet à HAND de voir le trafic aérien jusqu’à Saint-Martin. Une autre onde leur permet de connaitre la position de radioamateurs à 100 km à la ronde et de tracer les talkies-walkies des équipes sur place. Un système permet de créer un réseau wifi interne à l’île, où les secours formés peuvent indiquer leur position, s’il y a un danger là où ils sont et quel type de secours envoyer. Une plateforme cartographique tactique (réalisée en collaboration avec l’école de développeurs de Simplon de Marie-Galante), « Mambo », ouverte et citoyenne permet de donner des yeux aux secours : visualisation des véhicules en opération, des zones de refuge, du trafic maritime… le tout pouvant fonctionner sans internet. Un autre outil, à visée médicale est testé par HAND : un appareil de la taille d’un sachet de café pour faire le bilan d’un patient (cardio, température…) et transmettre les données par radio.

Renforcer la sensibilisation aux risques

L’exercice CaribeWave a permis de réfléchir à des stratégies de gestion de crise applicables à tout risque susceptible d’affecter la Guadeloupe. Rappelons que la Guadeloupe est soumise à six risques naturels majeurs : risque sismique, tsunami, inondation, cyclonique, volcanique et mouvement de terrain. Pour vous informer des conduites à tenir avant, pendant et après un tel événement, visitez le site dédié du gouvernement.

Plus d’informations :
 
Journée sur le terrain de HAND à Marie-Galante détaillée ici :
https://www.mediaphore.com/2018/03/caribe-wave-2018-exercice-alerte-tsunami-mobilisation/

Et là, heure par heure :
http://decryptageo.fr/caribewave2018-jour-j/?platform=hootsuite

L’opération #CaribeWave2018 de HAND en tweets, ici :
https://storify.com/HAND_HackersND/l-operation-caribewave2018-de-hackers-against-natu

Le projet EXPLOIT, par là :
https://exploit.univ-montp3.fr

Et enfin, l’association HAND :
http://hand.team/

Contact : contact@hand.team

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