Quels leviers pour développer la bio économie des produits biosourcés en outre-mer ?

RÉSUMÉ
Les plantes médicinales, les plantes à parfum, le bois matériau viennent spontanément à l’esprit lorsque l’on évoque les bio ressources à usages non alimentaires ou non énergétiques outre-mer. Vraisemblablement parce que certaines d’entre elles sont devenues des quasi-marqueurs de l’identité des territoires concernés et ont fait ou font encore l’objet de valorisation traditionnelle ou semi industrielle. L’ylang-ylang à Mayotte, le géranium à la Réunion, le bois de rose en Guyane en constituent des illustrations.
Le passé a donc indéniablement inscrit les bio ressources dans le paysage économique ultramarin mais il a aussi montré le caractère souvent non durable des réussites commerciales ou industrielles qu’elles ont générées.
Et ce passé inspire largement, les approches du présent portant sur la promotion de la bio économie des produits biosourcés.
Celles-ci sont fondées sur des convictions globalement partagées par les responsables politiques, académiques, de la société civile des territoires ultramarins. Celle, d’une part et c’est une réalité, que l’éventail des bioressources outre-mer est large, celle d’autre part et c’est beaucoup plus incertain, qu’il suffit d’identifier les bioressources disposant d’un potentiel de valorisation pour que les marchés s’y intéressent, s’en saisissent puis que la valeur nouvellement créée ruisselle sur les territoires concernés.
Ces convictions témoignent d’un rapport à la bio économie des produits biosourcés pas toujours en phase avec les réalités « terrain ».
D’abord parce que les acteurs précédemment cités n’ont qu’une connaissance lointaine des différents documents stratégiques produits au niveau national sur la bio économie. Ensuite parce que son portage politique est très inégal selon les territoires où les préoccupations alimentaires et énergétiques prédominent le plus souvent. Également, parce que les travaux engagés lorsqu’ils existent portent essentiellement sur l’inventaire et la caractérisation des bioressources d’intérêt potentiel et très peu sur les marchés susceptibles de les valoriser.
Concrètement, la bio économie des produits biosourcés outre-mer apparait, aujourd’hui, essentiellement consister en une collection de projets techniques par plante, groupe de plantes, ou bioressources – portés par des instituts spécialisés ou quelques entrepreneurs innovants. Ces projets relèvent de domaines variés et notamment de la cosmétique, de la parfumerie, de la pharmacie mais aussi de la construction. Ils communiquent sur l’intérêt d’un recours accru aux produits issus de la nature et sont généralement assez vertueux eu égard à leur impact sur l’environnement. Ils sont, en revanche, moins clairs sur les marchés visés, les quantités à produire et à mettre en marché. Ils apparaissent en conséquence peu susceptibles d’intéresser les financeurs privés et évoluent au rythme des financements publics collectés.
Dans ce contexte, le développement de la bio économie des produits biosourcés outre-mer devra être beaucoup plus pensé territoire par territoire que globalement. Il gagnera, en outre, à s’appuyer sur des produits « typés » visant des marchés de niche plutôt que prétendre installer quelques grandes filières dominatrices.
Pour ce faire, la double origine, tropicale et européenne des bioressources des outre-mer et des produits en étant issus, garantissant le strict respect des meilleures normes éthiques, environnementales et sociales dans les processus de production, devra être mise en avant.
Le développement de la bio économie des produits biosourcés nécessitera, en outre, de clarifier le rôle et le positionnement des différentes catégories d’acteurs concernés.
D’abord, en veillant à ce que le portage politique du développement de ce secteur soit beaucoup plus affirmé au niveau de chacun des territoires comme élément de leur stratégie globale de développement à moyen/long terme.
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Ensuite, en s’assurant que le nécessaire investissement dans la connaissance concerne, au-delà des bioressources et des processus permettant d’en retirer des produits utilisables, les marchés à même de les valoriser. Ceci nécessitera un travail beaucoup plus collectif des acteurs de la recherche, un regroupement des producteurs primaires et une association effective des acteurs de l’aval aux projets envisagés.
Également, en organisant sous des formes adaptées à la situation de chaque territoire l’accompagnement opérationnel des acteurs de la bio économie des produits biosourcés.
Ce sont vraisemblablement à ces conditions que les investisseurs privés pourront démultiplier voire relayer les financements publics quasiment, aujourd’hui, les seuls à être sollicités et mobilisés pour soutenir le développement du secteur.

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